« J’ai toujours essayé d’être proche des gens à marée basse, dans la misère »

Mikel Epalza est un prêtre hors du commun. Toute sa vie durant, il a partagé le quotidien des marins à terre comme en mer, pour écouter leurs prières, leurs espoirs mais aussi leurs solitudes. Il nous raconte son parcours, empreint de générosité et d'humanité.

Mise à jour : 17 février 2025

Depuis son port d’attache de Socoa, où sa silhouette massive se fond dans le décor depuis quarante ans, Mikel Epalza accompagne les autres. Un sens du partage que ses parents lui ont insufflé enfant. Né en 1946 à Halsou, de parents réfugiés de la guerre civile espagnole de 1936, il est le deuxième d’une fratrie de huit. « La famille est l’un de mes piliers, avec le peuple basque et la foi », avance-t-il.

Mikel Epalza est l’aumônier des marins, plus encore, le confident des Basques. Dans son antre, au presbytère de Socoa, le café est toujours chaud. À l’entrée, des couvertures jonchent le sol. « Les fidèles me les déposent pour que je les porte aux personnes dans le besoin. J’ai toujours essayé d’être proche des gens à marée basse, ceux dans la misère, en deuil, touchés par la maladie, le déracinement, confie-t-il. Si nous avons quelque talent, c’est ce que nous devrions tout faire pour les aider à remonter le courant. C’est l’essentiel de ma vie. » Une vie hors du commun qu’il a consacrée au monde des marins. « Pour sonder l’âme des marins, les soutenir, c’était à bord que ça se passait. Prêtre embarqué était la seule vérité pour être au plus près des conditions de vie des pêcheurs. C’est là que l’on découvre toute la noblesse de ce métier. »

L’histoire maritime a façonné notre pays. Il faut veiller à ne pas tomber dans le piège d’une mer sans pêcheurs. 

Des années durant, Mikel Epalza a partagé leurs prières, leurs espoirs, leur solitude et leur solidarité. Longtemps, il leur a donné la parole dans les pages d’Altxa mutillak, une bible de la vie maritime basque. « L’histoire maritime a façonné notre pays, insiste-t-il. La richesse halieutique fait partie de notre patrimoine. Il faut veiller sur elle, et ne pas tomber dans le piège d’une mer sans pêcheurs. »

Le livre Pêcheur d'hommes

Aujourd’hui, avec le livre Pêcheur d’hommes écrit avec la journaliste Coline Renault, il est encore question d'eux, à travers son parcours de prêtre. Des marins-pêcheurs, de leurs femmes aussi. « Elles assurent le quotidien à terre, essentiel à l’équilibre de celui parti en mer. J’ai toujours cru en leur force », glisse-t-il. De ces tranches de vie ici narrées, des mains tendues là encore, aux marins abandonnés, qui reprennent pied au Seamens club, le foyer des marins de Tarnos dont il a participé à la création. Aux migrants aussi, dont les drames vécus le touchent. « Cela résonne en moi. Je n’oublie pas que je suis petit-fils de réfugiés basques. Mes grands-parents originaires du Pays basque sud sont enterrés à Halsou, ce village qui nous a si bien accueillis. »

Aujourd’hui encore, Mikel Epalza a à cœur de lutter pour un Pays Basque pacifié, au sein du collectif chrétien Atxik berrituz. Il dit croire en l’arc-en- ciel dont les couleurs reflètent la lumière d’une société plus juste : multi-culturelle, multi-ethnique, multi-religieuse. « Pour moi, l’essentiel est de vivre ensemble. » Et, selon la devise des marins, de « continuer à s’accrocher à une étoile ».